Ca y est, c’est parti: 4 jours dans le sud ouest bolivien.
Ă€ moi les paysages dĂ©sertiques du Sud Lipez, les nuits Ă dormir dans des refuges par -15 sans chauffage, l’absence de douche, de lumière et d’Ă©lectricitĂ© et autres petits plaisirs de l’explorateur amateur…
Jour 1: Tupiza - Sud Lipez
Nous sommes le 6 au matin, et je monte dans mon beau 4x4. C’est un Land
Cruiser d’une belle couleur bordeaux (pour les Toyotistes: 6 cylindres 24v
4.5L EFI, Ă essence parce que sinon le diesel gèle avec le froid et c’est la
mierda , dixit mon pilote). D’ailleurs ici c’est le paradis du Land Cruiser:
les agences utilisent quasiment exclusivement ce véhicule - même si quelques
inconscients partent avec d’autres modèles. Justement, nous ferons la route en
convoi avec un autre Toyota et un Nissan Patrol (j’y reviendrai plus tard).
Bref, on est partis, et on commence l’ascension des hauts plateaux du Sud Lipez. Pas de chance, Ă peine 2 heures après le dĂ©part, le Patrol en question a un problème de refroidissement - on fait donc un arrĂŞt forcĂ© de quelques heures pour reboucher un “trou dans le radiateur”. Ça fait l’ocasion d’admirer le paysage, au demeurant très joli.
On reprend la route et on s’arrĂŞte dĂ©jeuner. Le vent souffle fort et c’est pas forcĂ©ment facile de remplir son assiette sans en mettre partout, ce qui ne manque pas d’attirer les animaux alentour (on est en plein milieu d’une exploitation extensive de lamas). C’est aussi le premier contact avec le climat très dur du Sud Lipez. Ou, pour dire les choses de manière plus pragmatique: il est 13h, le soleil tape mais il y a beaucoup de vent et donc, on se les caille sĂ©vère.
Au bout d’une journĂ©e de chemins, et après avoir traversĂ© quelques villages
perdus, on arrive enfin Ă San Antonio de Lipez, oĂą l’on s’arrĂŞtera pour la
nuit. MĂŞme s’il fait froid, grâce Ă l’altitude et Ă l’absence de pollution
lumineuse (forcĂ©ment, il n’y a pas d’Ă©lectricitĂ©) le ciel Ă©toilĂ© est
absolument superbe. Si j’y connaissais quelque chose je chercherais bien Ă
identifier les constellations, mais j’y connais rien alors je me contente
d’apprĂ©cier la vue :)
Jour 2: Sud Lipez
Réveil très matinal le lendemain, car le programme est chargé. Il fait foutrement froid - tellement froid , que les mâchoires de frein arrière du Patrol (encore lui) sont collées au tambour, ce qui nous incite à faire une pause au milieu de ruines pour les réchauffer au chalumeau et les décoller à coup de marteau. Après avoir roulé quelques heures, on finit par rentrer dans la réserve naturelle Eduardo Avaroa.
Juste avant la pause dĂ©jeuner, on a la possibilitĂ© de se plonger dans les bains chauds de la rĂ©gion de Polques, aux eaux pleines de minĂ©raux et de bienfaits pour la santĂ©. Aux alentours de 30°, c’est une bonne occasion de se rĂ©chauffer et ça remplace la douche. Et il faut dire que c’est quand mĂŞme pas courant d’avoir l’occasion de prendre un bain chaud, en plein air, avec vue Ă la fois sur des montagnes et le dĂ©sert…
Le dĂ©jeuner avalĂ©, cap sur l’extrĂŞme sud de la rĂ©serve naturelle. En route, on longera le dĂ©sert de Dali, appelĂ© ainsi car il n’est pas sans rappeler les toiles du cĂ©lèbre peintre. Je dois dire que ça rend beaucoup mieux en vrai qu’en photo, mais c’est souvent comme ça.
Un peu plus loin, la Laguna Verde , Ă cause de la prĂ©sence d’arsenic et de cuivre dans l’eau, miroite au soleil d’un vert Ă©meraude. Je commence vraiment Ă me sentir sur une autre planète… On est Ă l’extrĂŞme sud de la Bolivie: la frontière chilienne est Ă quelques centaines de mètres, de l’autre cĂ´tĂ© du volcan.
Après quelques heures de route de plus (j’en connais un qui aurait sĂ»rement adorĂ© rouler dans le coin avec son 4x4!) on arrive Ă Sol de Mañana , un endroit oĂą l’activitĂ© volcanique - omniprĂ©sente dans la rĂ©gion - se manifeste par des geysers de vapeur et des fumerolles 24/24. Très impressionnant aussi…
Ă€ la fin de la journĂ©e, on s’installe dans un hĂ´tel-usine frĂ©quentĂ© par quasiment toutes les excursions du coin. Il fait encore plus froid que la veille. La lĂ©gende dit que pendant la nuit qu’on y a passĂ©, un IsraĂ©lien bourrĂ© est allĂ© fumer une cigarette dehors et n’a pas rĂ©ussi Ă retrouver le chemin pour rentrer dans l’hĂ´tel. Après avoir entendu des cris, les guides ont fini par le retrouver Ă©tendu par terre, très faible et gĂ©missant de froid…
Jour 3: Remontée vers le Salar
Et c’est reparti pour une journĂ©e de 4x4… On continue notre progression vers le Nord Ă travers des paysages toujours dĂ©sertiques et volcaniques. Les lagunes se suivent et ne ressemblent pas, puisque maintenant nous longeons la Laguna Colorada , dont la couleur oscille entre le brun et le rouge vif. Les micro-organismes qui y vivent lui donnent cette teinte, qui change en fonction de l’intensitĂ© lumineuse du soleil.
Bonne nouvelle: après avoir passé 2 jours entre 4000 et 5000m, on amorce notre
descente vers le plateau du Salar Ă environ 3200m d’altitude. C’est pas grand
chose, mais c’est toujours ça de pris sur le froid, la bouche sèche et les
difficultés à respirer la nuit! Les lagunes et les paysages désertiques se
succèdent, entrecoupĂ©s de temps Ă autre par un envol de flamants roses… Si
vous n’avez jamais vu un flamant rose voler, c’est bien dommage pour vous
parce que c’est très joli.
On s’arrĂŞtera aussi Ă l’Arbol de Piedra , une formation rocheuse sculptĂ©e
par l’Ă©rosion. Et en fin d’après-midi on s’installe juste en bordure du salar,
pour dormir dans un hôtel entièrement construit en sel (sol, murs, sommiers,
tables…). PlutĂ´t marrant. Pour information, certains tĂ©mĂ©raires ont lĂ©chĂ©
les murs et ne leur ont pas trouvé un goût si salé que ça :)
Jour 4: Salar d’Uyuni
Pour le dernier jour - ou plutĂ´t la demi-journĂ©e - on se lève tĂ´t pour profiter du lever de soleil sur le dĂ©sert de sel. Les guides ont eu le sommeil lourd et ne se sont pas rĂ©veillĂ©s, donc on partira un peu en retard… Après Ă peine quelques centaines de mètres on y est dĂ©jĂ : une Ă©tendue blanche Ă perte de vue, absolument plate et dĂ©nuĂ©e de vie. Le salar d’Uyuni est le dĂ©sert de sel le plus Ă©tendu du monde (environ 12500 km²). Il semblerait qu’il abrite aussi une des plus grandes rĂ©serves mondiales de lithium, très utilisĂ© pour les batteries et les appareils Ă©lectroniques, ce qui n’est pas sans Ă©veiller les convoitises des multinationales (et du gouvernement).
Tout ce sel n’est pas arrivĂ© lĂ par hasard: ce qui est maintenant le dĂ©sert faisait partie du gigantesque Lago Minchin Ă l’Ă©poque prĂ©historique. Il y avait dans ce lac quelques Ă®les, qui Ă©mergent maintenant au milieu de l’Ă©tendue de sel. Du coup, on va visiter l’une d’elles - la principale et la plus connue: l’Ă®le de corail Incahuasi, plus ou moins au milieu du salar. Elle est remplie de cactus qui brillent dans le soleil levant.
On reprend la route - l’excursion touche Ă sa fin, et il n’y a plus qu’Ă traverser l’autre moitiĂ© du dĂ©sert pour rejoindre Uyuni. Bien sĂ»r, on s’arrĂŞtera pour prendre les indispensables photos avec effet de perspective. J’aurais aimĂ© que mes compagnons de 4x4 soient plus adroits pour ce genre de photos, mais on fait ce qu’on peut avec ce qu’on a - et il y a quand mĂŞme quelques photos rĂ©ussies! Pendant qu’on roule, on peut observer les montagnes “flotter” au dessus de la surface du salar, effet d’optique du Ă la diffraction de l’air par l’atmosphère.
Et
finalement, on arrive Ă Uyuni en dĂ©but d’après midi. J’avais l’intention de
rejoindre San Pedro de Atacama, de l’autre cĂ´tĂ© du dĂ©sert, au Chili.
Malheureusement les opportunités de transport sont plutôt limitées: il
semblerait que je doive reprendre un tour en 4x4 qui me déposera à la
frontière (pour un prix exorbitant) ou que j’attende 2 jours pour prendre un
hypothétique bus pour le Chili. Pour ne rien arranger, tout est fermé et il
est très dur d’obtenir une information fiable. Uyuni n’est pas franchement un
endroit accueillant, et je n’ai pas envie de me retrouver coincĂ© dans cette
ville… Tant pis, je dĂ©cide de rentrer Ă Tupiza en 4x4 et de passer
directement en Argentine ensuite. Je ne regretterai pas trop mon choix, car le
trajet retour Uyuni - Tupiza était absolument magnifique, avec une fois de
plus des paysages qui n’auraient rien Ă envier Ă ceux de l’Ouest amĂ©ricain
(que je ne connais pas encore, mais il ne perd rien pour attendre).
Et comme cette fois-ci je n’avais pas oubliĂ© de charger ni de mettre en route le GPS, voilĂ la carte du trajet: